Pourquoi les bons alimentaires sont une nécessité absolue pour les participants et les fournisseurs à Sévaré

A person sitting in a chair.
Aissata Diallo, participant au programme Food and reconciliation in Mali devant la boutique de la société générale alimentation et divers (SOGAD).
24 Juin 2021

Il est 16h06mn et nous venons d’arriver au grand marché de Sévaré, dans la région de Mopti. Aujourd’hui nous rendons visite à un des fournisseurs de Mercy Corps dans le cadre du programme Food & Reconciliation in Mali. C’est la dernière activité de distributions de produits alimentaires aux déplacés et l’occasion de faire le bilan avec les participants du programme. C’est également le moment d’échanger avec Aboubakar Nakono, le gérant des magasins de la société générale alimentation et divers (SOGAD).

Dans le magasin bondé, nous rencontrons d’abord Aissata Diallo, une ménagère de 32 ans, mère de 4 enfants. Aissata est originaire de Boni dans la commune de Haïré dans le cercle de Douentza dans la région de Mopti. Avant de se déplacer en 2018 dans la ville de Sévaré, elle vivait d’agriculture et d’élevage. “Nous vivions parfaitement de nos récoltes et de notre bétail. On avait une quinzaine de vaches et de veaux. On pouvait les traire et commercialiser le lait pour régler nos dépenses.”

Mais au début de la crise, tout change pour les habitants de Boni. L’insécurité s’y installe et les attaques à répétition font de nombreuses victimes. La ville est souvent le théâtre d’affrontements entre l’armée et les groupes radicaux avec des civils comme victimes collatérales. “Un jour, il y a eu des tirs dans le village et nous avons perdu des proches. Nous, nous avons pu nous échapper mais sans rien emporter. On a perdu notre liberté et notre autonomie. Nous devions alors nous battre pour trouver de l'aide en toute urgence.”

A son arrivée dans la ville de Sévaré, Aissata a pris connaissance des mécanismes d’appui aux déplacés internes. Très vite, elle a pu s’enregistrer auprès des agents des services de développement sociaux avant de bénéficier d’aides humanitaires de première nécessité. Dans le cadre du programme “Food and reconciliation in Mali” financé par l’USAID et mise en œuvre par Mercy Corps, Aïssata a perçu mensuellement des bons alimentaires échangeables contre de la nourriture auprès de fournisseurs agréés. Pendant 4 mois de prise en charge, elle est venue régulièrement chez monsieur Nakono faire ses provisions. “ Ici le choix des produits nous appartient. Je prends généralement du riz, du mil, de l’huile végétale, du lait, des bouillons culinaires, du thé et du sucre. Les rations de riz et de mildurent environ un mois.”

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Aissata Diallo vient de récupérer ses produits alimentaires pour le mois au magasin de SOGAD.

En plus des nourritures de première nécessité, les déplacés internes ont eu également droit à des produits d'hygiène comme le savon, l’eau de javel et des aquaTabs. Cette distribution a été réalisée pile au moment où la pandémie du COVID‑19 affichait les plus grands taux d’infection. Les kits ont apporté l’assurance d’une protection efficace contre le virus.

“Les produits sanitaires nous ont beaucoup aidé. Ça nous a permis de renforcer notre hygiène en éliminant les microbes et en réduisant les risques d'infections. Jusqu’à présent mon lot n’est pas terminé.”

Aujourd’hui Aïssata fait partie des points focaux des déplacés à Sévaré. Elle apporte son aide et son soutien aux nouveaux déplacés en s’assurant de leur enregistrement et de leur prise en charge. Lors des distributions de Mercy Corps, elle sert de relais d'information et s’assure de la bonne marche des activités. Grâce à ce rôle de relais, elle reste en étroite collaboration avec la communauté des déplacés à Mopti. A présent, elle a une meilleure compréhension de leurs problèmes et de leurs besoins. “Les déplacés continuent d’affluer dans les grandes villes sans aucun moyen de subsistance. Ces 4 mois nous ont été d’une aide essentielle mais un appui aux jeunes en termes de métier serait très bénéfique car l’assistance n’est pas éternelle. Chez nous on dit: « Au lieu de donner du poisson à quelqu’un, apprends-lui à pêcher ».”

Selon ses propos, les déplacés sont également confrontés à des problèmes de santé car certains tombent malades et n’arrivent pas à se soigner par faute de moyen. Des cliniciens effectuent souvent des visites dans les camps de déplacés mais cela reste limité. Par ailleurs, beaucoup de déplacés ne sont pas installés dans des sites dédiés et se débrouillent dans de petits logements avec le risque d’être expulsés à tout moment. Elle se dit aussi très inquiète par rapport à la scolarité des enfants car ils ne vont plus à l’école et leur encadrement est difficile dans le contexte actuel. “La vie en ville n’est pas facile, Ils nous arrivent de chercher des petits boulots journaliers car sans l' appui alimentaire, nous peinons à les nourrir.”

Malgré ces difficultés, Aissata garde l’espoir de retourner à Boni. Elle se dit également très satisfaite de l’appui de Mercy Corps et surtout de la fiabilité du système de E-voucher.” Avec les nouvelles cartes E-vouchers de Mercy Corps, tout est personnalisé. Sans cette carte et le code, personne ne peut accéder à mon compte. Je peux continuer à faire des transactions jusqu’à la fin de mon solde. Aucun commerçant ne peut imputer des sommes lors de nos achats car tout est électronique. Depuis le début jusqu’à ce jour, nous n’avons pas vu d’appui similaire à celui de Mercy Corps. Nous leur en sommes très reconnaissants. Qu’ils continuent leurs bonnes œuvres envers les plus vulnérables et qu’ils nous aident à nous autonomiser.”

Pendant que Aissata fait ses emplettes, Madou Karambé, 31 ans, décide de partager son expérience avec nous. Natif du cercle de Bandiagara, c’est aussi avec la crise qu’il a été obligé de se déplacer à Sévaré. Après avoir vécu 4 mois sous l’embargo de personnes armées, il s’installe finalement dans le quartier de Djondjori. Pour Madou, l'appui de Mercy Corps est venu à point nommé car il n’avait aucune réserve alimentaire. “On vivait de nos champs et de notre bétail mais nous avons tout perdu en venant ici. Dans ce contexte difficile nous avons étés accueillis, enregistrés et pris en charge. Cet appui a été crucial pour notre survie à Sévaré et nous vous en sommes reconnaissants.”

A person and a mercy corps agent outside the sogad store.
A person and a mercy corps agent outside the sogad store.
Madou Karambé et un agent Mercy Corps devant le magasin de SOGAD.

Madou décrit son expérience avec Mercy Corps comme satisfaisante. “Depuis le début, nous n’avons rencontré aucun problème dans la récupération de nos rations alimentaires. Ils nous laissent le choix et le tout se passe dans la joie et la bonne humeur. Nous avons accès à tous les types de nourriture dont nous avons besoin comme le thé, le riz ou l’huile.”Comme Aissata, Madou a évoqué les problèmes d'emploi, de scolarité et de logements qui persistent chez les déplacés. Avec de l’aide supplémentaire, il compte se lancer dans des petits commerces pour subvenir à ses propres besoins.

Après une longue journée de service, Aboubacar Nakano,le gérant des magasins SOGAD a fini de servir ses clients. Lors de nos discussions, il insiste fortement sur sa satisfaction par rapport à la collaboration avec Mercy Corps qui dure depuis plus de 3 ans. “J’apprécie réellement de travailler avec Mercy Corps car tout se déroule sans problème. C’est un travail que nous effectuons avec beaucoup de plaisir et de courage. Pour nous, nous sommes tous pareil, (fournisseurs et participants). La méthode actuelle fonctionne très bien, il n’y a pas de mésentente avec les clients et tout se passe correctement sans dispute ou incompréhension.”

A person in the sogad store.
A gauche Aboubacar dans le magasin de SOGAD et à droite la carte, le terminal et les produits alimentaires.
A card, terminal, and food products.

Pour Aboubacar, le fait de collaborer avec Mercy Corps est un gros boost pour leur commerce. Avec cette approche, l’organisation appuie à la fois les participants mais aussi les fournisseurs locaux également fortement impactés par la crise. Avec la nouvelle méthode électronique, le traitement devient plus fluide avec moins de papier et moins de procédures.”Ça nous facilite beaucoup la tâche. Le fait d’utiliser la carte et le terminal renforce la confiance entre nous et les participants. Ils peuvent effectuer des transactions jusqu’à l’épuisement de leur solde. Nous n’avons rencontré aucune difficulté, ni aucune plainte avec cette méthode. Quand on est commerçant, on est forcément redevable envers sa clientèle par rapport à sa qualité. Sans eux, il n’ y a pas de business donc nous nous efforçons de répondre favorablement à leurs requêtes. Je remercie vraiment Mercy Corps car il nous respecte beaucoup dans le cadre du travail.”

A la fin de journée, fournisseurs, point focal des déplacés et agents de Mercy Corps retournent chez eux avec le sentiment d’une mission correctement accomplie pour la plus grande satisfaction des populations vulnérables.

Avec le soutien du Bureau d'assistance humanitaire (BHA) de l'USAID, Mercy Corps a mis en œuvre le programme Food and Reconciliation in Mali (FRM) en deux phases entre juin 2019 et février 2021 pour répondre aux besoins urgents en matière de sécurité alimentaire des populations touchées par le conflit dans le centre du Mali. FRM a soutenu des milliers de personnes déplacées à l'intérieur du pays (PDI), de ménages et d'individus rapatriés,, et de populations hôtes vulnérables en leur fournissant des bons et un soutien complémentaire en eau, hygiène et d'assainissement dans des zones touchées par le conflit au centre du Mali. Mercy Corps continue actuellement ses interventions dans la région à travers le programme Projet d’Appui à la Sécurité Alimentaire, la Réconciliation et la Résilience qui vise à améliorer le bien-être et la résilience économique des communautés du centre du Mali par une réponse holistique et sensible aux conflits.